Anne et Georges forment un couple uni et amoureux que la vieillesse va mettre à l’épreuve. Diminuée, Anne (Emmanuelle Riva) est soignée avec tendresse par son mari Georges (Jean-Louis Trintignant), malgré l’incompréhension de leur fille Eva.

Michael Haneke filme la banalité d’un couple octogénaire dont la vie de retraités est rythmée par les repas, les courses, les réminiscences de leur jeunesse (Anne était pianiste, lui peut-être écrivain) et la nécessité de rester ancré dans le présent par la lecture quotidienne du journal Le Monde.  On sent poindre de temps en temps l’agacement de la vie à deux mais, chose rare, le respect mutuel est toujours là. L’univers est clos (l’appartement) et même les apparitions d’Éva ne semblent bousculer cette nouvelle étape difficile de leur vie.

Cinéaste de l’anti-pathos, Haneke utilise une réalisation froide avec de nombreux plans séquences, des champs et des contre champs. Aucun jugement, aucune démonstration, presque un documentaire sur ce couple d’intellectuels. Pas de longues scènes larmoyantes, mais des profonds instants d’émotion, des longs plans silencieux et une intensité dramatique tout en suggestion.

Tout en gardant cette même approche cinématographique, le scénario bascule : Anne est malade et ne veut, après une première expérience, retourner à l’hôpital. Georges, sans se poser la moindre question, va naturellement accompagner Anne dans sa déchéance. De cet accompagnement va s’échapper des moments de grâce intenses, des moments tendresse et d’émotion exceptionnelle : oui, ils se sont aimés et ils s’aiment. « C’est beau… La vie… Si longtemps… La longue vie » dit Anne à l’intention de son mari en effeuillant les albums photos. A l’instar du très beau « Quelques jours de printemps » avec Vincent Lindon et Hélène Vincent, « Amour » interroge le spectateur sur la fin de vie.

A chaque pas du film, on est épaté par l’intelligence et la profondeur de ce cinéaste. L’auteur du « Ruban Blanc » (Palme d’Or en 2009) a obtenu une nouvelle fois, lors du Festival de Cannes de 2012, la plus haute récompense pour « Amour », brillant huis-clos sur la résistance de l’amour face au naufrage de la vieillesse.

Porté par deux acteurs en état de grâce (Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva), « Amour » est une œuvre bouleversante.