Après l’univers carcéral de son dernier film « Un Prophète« , c’est dans le genre mélodramatique que le cinéaste virtuose Jacques Audiard fait cette fois une incursion. L’histoire, poignante, est somme route assez banale: deux écorchés de la vie, qui n’auraient jamais du se rencontrer, vont apprendre à s’apprivoiser l’un l’autre, et ce malgré leurs différences sociales.

Car il est aussi question de classes sociales dans « De rouille et d’os »: sur une côte d’Azur dont on ne voit que les arrières cours, les grandes surfaces commerciales et les logements sordides, Stéphanie (Marion Cotillard) et Ali (Matthias Schoenaerts) vont apprendre à se connaître: lui est un père écervelé et irresponsable qui vit de débrouille et de combats de MMA et autres free-fights, elle une jeune femme qui vient de subir un grave accident.

Sur le papier, le film aurait pu être d’une banalité confondante: la rencontre improbable entre une handicapée et un boxeur était bon pour le mélo pathétique. Mais Jacques Audiard, en maître qu’il est, arrive à rendre touchante cette histoire pas forcément crédible et à sublimer ses personnages. Leurs buts à tout prix: s’extirper de leurs conditions. Marion Cotillard n’a jamais été aussi subtile, Matthias Schoenaerts sorti du puissant et glauque « Bullhead » joue (un peu trop?) un colosse au cœur de pierre. Ils sont entourés de deux grands acteurs: Corinne Masiero qui est la grande révélation de « Louise Wimmer » et Bouli Lanners, l’acteur de « Louise-Michel » et réalisateur du très beau « Les Géants« .

Adapté d’un recueil de nouvelles de l’auteur américain Craig Davidson « Un goût de rouille et d’os », publié en septembre 2005, Jacques Audiard a réussi son pari: faire un film d’auteur mélodramatique pour le grand public.