Paris, un dimanche pluvieux sur le boulevard des Batignolles. Au théâtre Hébertot, les auditions pour la pièce « La Vénus à la fourrure » se terminent pour Thomas (Mathieu Amalric), l’adaptateur de la pièce qui n’a pas trouvé sa Vanda, le personnage féminin. Déboule alors, en retard, une comédienne (Emmanuelle Seigner), en apparence très loin de l’héroïne… A force de conviction, elle réussit à donner la réplique au maître des lieux.

Après « Carnage » adapté de la pièce de Yasmina Reza, c’est à nouveau le théâtre qui inspire le nouveau film de Roman Polanski qui a trouvé en « Venus in Fur » de David Ives (également co-scénariste du film) les thèmes de prédilection qui lui sont chers. Surtout, le cinéaste octogénaire retrouve, à l’instar de Bernardo Bertolucci et de son dernier film « Moi et Toi » , une nouvelle jeunesse en concentrant, dans un film minimaliste, sa caméra sur deux acteurs dans un huis-clos étouffant.

Le spectateur est averti dès le début du film, avec son long travelling dans les allées du boulevard parisien et sur le fond musical guignolesque écrit par Alexandre Desplat, que le temps n’est pas au beau fixe. Thomas est plus qu’énervé de ne pas avoir trouvé parmi les actrices (qu’il exècre d’ailleurs) le personnage de sa future pièce et ce n’est pas l’allure vulgaire de la nouvelle venue, également prénommée Vanda, qui va arranger les choses.

Petit à petit, un renversement (prévisible bien sûr) se joue sous nos yeux: Thomas est séduit par le jeu de sa nouvelle Vanda, serait-elle enfin la perle rare? Elle est vulgaire à la ville, certes, mais sur scène elle éblouit. Le metteur en scène, roi en son théâtre, lâche ainsi les ficelles de la marionnette Vanda. Il n’y a plus qu’à les attraper et à le pousser dans ses retranchements.

Le dernier film de Roman Polanski est une oeuvre tout à fait jubilatoire pour qui se laissera prendre au jeu de massacre organisé par le maître: il rappelle le burlesque de « Rosemary’s baby » avec une savante et réjouissante dose psychanalytique. Le velours rouge du théâtre, les accessoires de la scène (un divan, un cactus en forme de phallus), le cuir des bottes de Vanda ainsi que le costume de serviteur: le spectateur est définitivement plongé dans une catharsis sexuelle.

« La Vénus à la fourrure » n’est pas du théâtre filmé comme on l’a écrit ici et là mais bien un film de cinéma, intelligemment mis en scène avec deux excellents comédiens qui s’en donnent à cœur joie: Emmanuelle Seigner, qu’on avait vu furtivement dans « Quelques heures de printemps » face à Vincent Lindon, peut enfin dévoiler tous ses talents d’actrice et le toujours génial Mathieu Almaric (qui ressemble ici étrangement au cinéaste…)




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